Couple et argent, comment s’en sortir?

Vivre à deux peut rapidement devenir un enfer, surtout quand les problèmes d’argent pointent le bout de leur nez. L’amour, plus fort que tout ? Pas si sûr ! C’est pourquoi il est très important de se mettre d’accord et trouver le meilleur moyen de gérer son argent dans le couple.

Célibataire, la question ne se pose pas, ou peu. Vous avez de l’argent, vous le dépensez et en épargnez peut-être. Vous vous faites plaisir comme bon vous semble. La question est plus compliquée quand on vit à deux, à trois… ou à quatre ! Peut-on se permettre des vacances cet été ? Est-ce vraiment une priorité ces jolies chaussures que vous avez repéré en vitrine ? Et cette voiture de sport que vous ne pouvez désormais plus vous offrir… Pour voyager, il faut penser à payer 4 billets plein pot, le budget couches à lui seul équivaut à votre ancien budget sorties et vos courses de la semaine, n’en parlons pas ! Comme disait le cynique et néanmoins drôle Sacha Guitry, célèbre dramaturge français, «vivre à deux, c’est résoudre des problèmes qu’on n’aurait jamais eus tout seul». En effet, l’amour est l’art des compromis, en argent aussi.

De la même façon que chaque être est unique, chaque couple est différent. Certains sont dépensiers, d’autres rigoureux voire comptables dans l’âme… Il est ainsi très important de trouver la formule qui sied à chacun pour gérer au mieux les dépenses mensuelles. L’argent est souvent un tabou et en parler dans un couple s’avère à peu près aussi romantique que laver les chaussettes de son conjoint. Seulement, ne pas en discuter peut se révéler bien plus lourd de conséquences que de mettre cartes sur table au début d’une relation.

Témoignages

Siham, 27 ans et Abdellah, 32 ans

«Nous sommes mariés depuis un an. Au départ, nous avions du mal à trouver nos marques et bien gérer nos dépenses. Nous avions gardé nos comptes séparés et payions tous deux, chacun de son côté nos dépenses communes en plus de nos dépenses personnelles. Nous étions souvent dans le rouge, comme on ne faisait pas vraiment attention à l’argent qui sortait. Depuis, nous avons ouvert un compte joint où nous virons chacun la même somme. Un compte que nous utilisons pour payer nos dépenses communes (loyer, eau et électricité, courses…). Désormais, nous arrivons même à mettre de l’argent de côté ! Il est très difficile de gérer son argent à deux car il faut d’abord se débarrasser de ses habitudes de célibataire».

Abdelhalim, 58 ans et Saida, 49 ans, deux enfants

«Dans notre couple, monsieur travaille et madame (qui est plus organisée) fait les comptes. C’est comme ça depuis des années et cette formule nous permet de bien gérer notre argent. Nous avons un seul compte auquel nous avons accès tous les deux. Nous sommes tous deux des personnes raisonnables et nous savons ce que nous pouvons nous offrir et ce qui nous est impossible de payer. Quand l’un ou l’autre veut se permettre une petite folie, on se concerte. On se concerte d’ailleurs avant chaque achat plus ou moins important. Nos plus gros budgets sont consacrés aux courses, aux écoles pour les enfants et aux vacances».

Saad, 44 ans et Imane, 38 ans, un enfant

«Voilà bientôt 4 ans que nous sommes mariés. Chez nous, tout est réglé au millimètre. Il faut bien quand on a un enfant à charge. Par contre, nous avons toujours tenu à garder nos comptes séparés. Nos amis se moquent souvent de nous et ne comprennent pas forcément nos calculs dans notre couple. Mais c’est comme ça qu’on s’en sort avec le sentiment de garder une certaine liberté malgré tout».

«Il faut définir la place de l’argent dans le couple dès le départ»

Entretien avec Btissam Benjelloun, thérapeute de couples

Amour et argent ne font-ils toujours pas bon ménage aujourd’hui ?

Difficile de dire qu’on peut vivre d’amour et d’eau fraiche. Si au début le sujet n’a pas d’importance, les choses se gâtent au mariage. Surtout que la tradition maghrébine veut que ce soit l’homme qui subvienne aux besoins de la femme et du foyer pour «prouver sa virilité». Idée qui a la peau dure même si aujourd’hui l’homme dit vouloir épouser une femme avec un revenu stable pour l’aider au quotidien. L’argent dans le couple, c’est encore tabou. Il me semble parfois qu’il est plus facile de parler sexualité que d’argent !

Et depuis que la femme a investi le milieu du travail, est-ce plus simple ou plus compliqué ?

Les rôles restent en général répartis à l’ancienne avec un salaire féminin secondaire. Les mentalités évoluent lentement et les conflits surgissent quand il s’agit de décider qui paie.

En général l’homme prend en charge les investissements importants, ceux qui ont une forte valeur symbolique : la maison, la voiture… et les femmes assurent les dépenses quotidiennes (dépenses moins nobles). Les femmes ont ainsi le sentiment que leur argent n’est pas reconnu à sa juste valeur. Certaines sont mal à l’aise avec leur indépendance financière. Le fait que l’homme gagne plus crée une sorte d’équilibre.

Les hommes sont souvent embarrassés, voire castrés quand il y a inversion de « l’ordre naturel des choses ».

Les deux sexes ne donnent pas la même valeur à l’argent. Pour l’homme c’est un moyen d’action personnelle. Il aime avoir un jardin secret, un compte personnel, se sentir libre.

Pour la femme, c’est un instrument d’autonomie, le tout est de ne surtout pas être dépendante de son mari comme l’était sa mère.

Quels sont les problèmes auxquels vous êtes le plus confrontée avec vos patients?

Dans les couples, certains conflits liés à l’argent sont souvent un prétexte. Je constate régulièrement que c’est un révélateur de problématiques plus profondes. Il est plus facile de se battre sur des questions financières que sur des problèmes de fond comme le respect, la confiance, les valeurs familiales, le manque de communication, les secrets, les tabous…

Beaucoup de choses ont changé entre mari et femme, tout sauf l’argent. Même si on se marie par amour, le sujet de l’argent
est là, acteur invisible, un filtre qui traduit nos craintes, nos blessures. Il y a beaucoup de choses qui se rejouent à travers l’argent, beaucoup de non-dits.

Avis d’expert : «En général, les couples commencent par ouvrir un compte personnel et décident d’ouvrir en sus un compte-joint pour gérer le budget de la famille»

Mostafa Abadou Directeur des Affaires Juridiques Société Générale Maroc

Les couples qui souhaitent ouvrir un compte bancaire ont le choix entre plusieurs formules.

Ils peuvent tout d’abord opter pour des comptes individuels (chacun est titulaire de son propre compte bancaire), en choisissant ou non de donner procuration au conjoint. En cas de procuration, le mandataire a tout pouvoir pour faire fonctionner le compte bancaire.

Les couples peuvent également opter pour un compte-joint. il s’agit là d’un compte collectif en co-propriété, qui fonctionne selon la volonté des époux : si ces derniers décident que le compte fonctionne en solidarité active (compte ouvert au nom de «Monsieur etMadame»), les signatures des deux titulaires du compte seront alors requises pour réaliser les opérations. Si les époux décident que le compte fonctionne en solidarité passive («Monsieur ou Madame»), alors la signature d’un seul titulaire pourra suffire à faire fonctionner le compte, ce qui d’une certaine manière peut être moins contraignant.

En général, les couples commencent par ouvrir un compte personnel et décident d’ouvrir en sus un compte-joint pour gérer le budget de la famille.

Le décès de l’un des conjoints est délicat à gérer car le compte-joint est géré par les dispositions du code civil de la co-propriété (droit d’indivision). Si le compte-joint a été ouvert avec solidarité active(«et»), et en cas de doute sur la part revenant à chaque co-titulaire de compte, la moitié des avoirs disponibles sur le compte joint revient au conjoint survivant et l’autre moitié entre dans la succession du défunt.

Si le compte-joint a été ouvert avec solidarité passive («ou»), et en cas d’absence d’opposition des héritiers du défunt, le conjoint survivant peut continuer à faire fonctionner librement le compte joint il devient de facto l’unique propriétaire du compte.

En cas de divorce également, les choses ne sont pas toujours faciles. Si le compte-joint a été ouvert avec solidarité active («et»), son fonctionnement devient quasiment impossible jusqu’à ce qu’un accord ou une solution (amiable ou judicaire) soit trouvée pour procéder à
la répartition des avoirs. Si le compte-joint a été ouvert avec solidarité passive («ou»), il est également souhaitable que les conjoints décident ensemble et ‘’rapidement’’ de ce qu’ils souhaitent faire du dit compte.

 

Source: FA

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