Les crèches ont le vent en poupe, et cela ne date pas d’aujourd’hui. Ces structures d’accueil des enfants en bas âge ont réussi le pari de devenir, pour beaucoup de familles, un moyen privilégié pour la garde de leurs enfants.
SEdevant d’être dotées d’un personnel qualifié et d’un cadre sécurisé et enrichissant, les crèches sont soumises depuis 2008 à un cadre juridique spécifique. «En 2008, le décret 1/08/77 qui gère la loi 40/04 des crèches a précisé la définition de la crèche en tant qu’un espace qui répond aux besoins des petits. Cette loi traite les conditions d’encadrement et de santé ainsi que les sanctions et les accords du Maroc avec d’autres pays. Un décret d’application a été mis en vigueur le 21 mai 2009 sous la forme d’un cahier de charges où on insiste sur les espaces nécessaires pour le développement équilibré de l’enfant», précise Abdelkader Habchi, chef du service d’action éducative de base au ministère de la Jeunesse et des Sports central. En effet, les crèches se doivent de remplir différents critères dont la superficie qui est de 4 m² pour un enfant de 18 mois et de 4,75 mètres au-delà de cet âge. Aussi, et en plus d’un local agréable, confortable et propre, la crèche doit aussi assurer la protection de tout risque possible (maladie subite ou accident) en ayant un pédiatre prêt à intervenir à tout moment. Les éducatrices et leur formation sont un volet tout aussi important. Selon la loi, l’éducateur (trice) devrait avoir un niveau minimum de baccalauréat en plus d’une expérience de plus de deux ans. La qualification des encadrants est donc primordiale. «Ces personnes doivent être formées et habituées à des méthodes adaptées aux enfants en bas âge. Les petits ne peuvent pas être confiés aux personnes qui n’ont jamais enseigné. Pour cela, les établissements scolaires doivent donner beaucoup d’importance à la formation et la formation continue de leur personnel», souligne Dr Bouchaïb Karroumi, pédopsychiatre.
Première séparation, premiers apprentissages
«L’entrée dans la crèche est une première séparation, et un premier jalon dans ce processus nommé : ‘’séparation-individuation’’, ce long cheminement permettant à l’enfant de devenir autonome. Même si elle est imposée par la reprise du travail de la maman, elle est aussi bénéfique à l’enfant qui y gagnera des compagnons de jeu et des activités», explique Ghita Alami, psychologue. En tenant compte de plusieurs critères, les parents peuvent choisir la crèche la mieux adaptée pour accueillir leur enfant. Et pour réussir au mieux cette insertion, le dialogue au quotidien, l’échange entre parents et professionnels sur la vie de l’enfant est à même d’installer un climat de confiance et de mieux accueillir l’enfant. Il faudra aussi, conseillent les spécialistes de la petite enfance, en parler avec son enfant, quelque soit son âge. «Il ne faut pas croire qu’un bébé ne peut pas comprendre. On peut aussi lui expliquer avec des termes simples et un discours adapté à son âge, la situation qui oblige sa maman à le confier à une crèche. Dans certains cas, le bébé réagit mal à une séparation précoce. Il peut perdre l’appétit ou pleurer. C’est pour cela qu’il faut le préparer à l’avance et commencer la séparation de manière progressive», explique Dr Karroumi. Et pour réussir au mieux cette séparation, la psychologue conseille une période d’adaptation : «Une période d’adaptation est donc indispensable que ce soit pour le bébé ou pour ses parents. Pendant les deux premières semaines, le petit passe une ou deux heures par jour à la crèche, puis une demi-journée, et pour finir une journée entière», rappelle Mme Alami. Au cours de cette période, le rôle de la mère est central, car elle accompagne son bébé dans son nouveau lieu, où il se tiendra bientôt seul. «Ce lieu sera pour lui investi de sa présence et son bébé se souviendra d’elle lorsqu’il s’y retrouvera seul. Ce temps d’adaptation est aussi l’occasion de faire connaissance avec les maitresses de la crèche, de leur poser des questions, et de formuler les attentes des parents en matière d’éducation et de soins de l’enfant».
Dans une crèche, l’apprentissage se base sur les cinq grands domaines d’activité, à savoir la psychomotricité, le langage, l’autonomie, la socialisation et l’éveil artistique. Sachez aussi que la sociabilité de l’enfant est grandement facilitée par la crèche. L’enfant y apprend à vivre avec les autres. Il apprend à accepter, à refuser, à se défendre, à s’exprime, sous l’œil vigilent de l’équipe éducatrice. Et c’est toujours à la crèche qu’incombe la responsabilité de transmettre des principes et des valeurs, en lui donnant envie d’aller vers de nouvelles découvertes et l’envie d’apprendre, à chaque fois, des choses nouvelles.
Conseils et astuces
Le jour de la rentrée, n’hésitez pas à apporter à la crèche un objet de la maison : un doudou, un jouet, un foulard avec votre odeur. Ces objets familiers sont autant de petits repères qui rassureront l’enfant, ce sont des objets transitionnels.
En fin de journée, prenez quelques minutes pour parler avec la puéricultrice de la journée de votre enfant. Une façon de passer le relais, tout en douceur, à l’inverse d’un départ en catimini qui risquerait de donner à l’enfant le sentiment d’être abandonné.Ghita Alami, psychologue.
«La séparation est plus difficile à certains âges»
Entretien avec Pr Ghizlane Benjelloun, pédopsychiatre
Quel est l’âge idéal pour mettre son enfant à la crèche?
Il y a surtout des âges où il faut absolument éviter de mettre son enfant à la crèche. C’est à 8-9 mois, à un an et à 18 mois. Ce sont des âges où l’enfant ressent une angoisse très importante de la
séparation. S’il fait son entrée à ces âges-là, il y a un risque pour que l’angoisse persiste, lui faisant haïr toute structure scolaire.
Quelles sont les conditions que doit remplir la crèche pour qu’un enfant puisse s’y plaire?
Les conditions d’accueil doivent être au minimum agréables sans répondre à des critères de luxe.
Ce qui est essentiel c’est l’empathie, l’attention et la formation des professionnels en plus de la sécurité des lieux.
Quelles sont les difficultés que peut avoir un enfant à la crèche?
Un enfant intolérant à la frustration ou à la séparation aura plus de mal à intégrer les règles de vie en groupe et l’absence de sa mère, qui est sa meilleure avocate. Mais c’est un apprentissage essentiel de la vie. Il y a aussi le problème des enfants qui se bagarrent, se tapent, se griffent, s’arrachent les jouets… C’est la même chose que les grands! L’enfant apprend à se défendre et à utiliser des moyens autorisés pour cela.
Les crèches sont souvent pointées du doigt lorsqu’il s’agit de problèmes de santé et de mauvaises manies…Est-ce une vérité ou un préjugé ?
Il arrive que ce soit vrai mais il est dans l’absolu plus simple de projeter sur l’école les difficultés ou les troubles de l’enfant.
Certes, l’école est un relais éducatif mais seulement un
relais, les parents ne doivent pas attendre de l’école ni de la crèche qu’elle éduque leurs chérubins.
Comment les parents doivent-ils gérer un enfant à la crèche?
Il faut être constamment en communication avec les professionnels de la crèche sans les harceler, rester à l’écoute de leur remarques et essayer d’appliquer certaines règles aussi à la maison pour que l’enfant ne soit pas déstabilisé entre les règles de la maison et de la crèche.
Source: FA